France: en visite sur les décombres laissés par le cyclone, François Bayrou promet de remettre « Mayotte debout »
Par Nadjib TOUAIBIAPublié le
Le chef du gouvernement, François Bayrou, s’est rendu sur l’île dévastée de Mayotte pour exposer un programme placé sous le sceau de l’urgence et de la reconstruction à long terme. Un itinéraire de visite soigneusement tracé, hors de la foule. Des enseignants ont tout de même exprimé leur colère devant le décalage entre les discours, les promesses, et la réalité.
« C’est une honte ! », cette exclamation est celle d’un enseignant de Mayotte face à Élisabeth Borne, ministre de l’Éducation. La scène, un dialogue de sourd entre un fonctionnaire exaspéré par les promesses non tenues et une autorité visiblement hors sol, restera sans nul doute dans l’histoire des suites au terrible cyclone qui a dévasté l’île.
« Depuis quinze jours, dans tous les bidonvilles ici, Petite Terre, Grande Terre, Kawéni, Cavani, personne n'est venu. Vous pouvez dire ce que vous voulez aux informations, la réalité, elle est là », martèle un enseignant. « Il y a eu des distributions », murmure la ministre.
« Les gens du lycée des Lumières doivent aller au point relais à la mairie de Mamoudzou. (...) C'est dix kilomètres à pied en plein cagnard, sans eau, sans nourriture. C'est impossible, c'est infaisable ». Élisabeth Borne tourne le dos et puis s’en va en lâchant un « ok ». Réaction : « c’est une honte ! »
Les ministres qui ont accompagné lundi 30 décembre François Bayrou, chef du gouvernement, étaient-ils suffisamment préparés, concrètement informés de la réalité après le cyclone ? Rien n’est moins sûr, comme en témoignent les rares contacts avec la population.
Curieusement endimanché, le premier ministre a d’ailleurs soigneusement évité tout bain de foule. Il est apparu auprès d’interlocuteurs attentifs. Il s’est exprimé sans la moindre contradiction. A l’évidence, tout a été fait pour éviter l’expression de la colère qu'avait dû affronter Emmanuel Macron, dont les dérapages verbaux ont choqué une partie de l’opinion.
Mais pourquoi donc Bayrou s’est-il rendu à Mayotte ? La visite éclair avait apparemment pour objectif de réparer l'erreur de l'absence durant les premiers jours après le cyclone et de se remettre en première ligne sur un dossier porteur de toutes les urgences.
Qu’on se le dise : Matignon relève désormais le défi « Mayotte debout ». Il s’agit de mesures immédiates et d’engagements sur le long terme destinés à relever l'archipel.
De l’électricité, de l’eau, la fibre et la 5 G
Promis : le courant sera rétabli pour l'ensemble des foyers mahorais d'ici fin janvier. L’île disposera de 200 agents supplémentaires et l’opérateur EDF déploiera 200 générateurs répartis sur chaque commune pour assurer l'alimentation des points sensibles.
L’armée mettra ses unités spéciales à disposition pour rétablir l’approvisionnement en eau. La production passera de 38.000 m3 par jour à 40.000 m3 d’ici à juin 2025. Plus de souci non plus pour les télécommunications. Les Mahorais auront la 5G, toujours pour la fin juin. En attendant ce saut dans la modernité, ils disposeront de 200 antennes Starlink. Internet pour tous !
Reste la scolarité. La rentrée devrait se faire progressivement, établissement par établissement, à partir du 13 janvier. On n’en sait pas plus. Faute d’avoir pris la précaution de la concertation avec le corps enseignant resté sur place, la ministre devra faire preuve d’ingéniosité. On attend de voir.
Bayrou se donne comme ambition de « reconstruire » Mayotte. Il y aura donc une loi d'urgence présentée au Conseil des ministres, et un établissement public dédié sera créé pour ce faire. Dans l’attente de cette nouvelle île, pas question de laisser pousser à nouveau les bidonvilles rasés par le cyclone. Le législateur y veillera. Quant aux vraies habitations endommagées, bâches, charpentes et tôles seront acheminées en urgence, et des prêts garantis par l’État aideront les familles à rebâtir leurs logements à coût réduit.
Et la sécurité ? Pas d’inquiétude, des policiers et gendarmes viendront en renfort. Un « plan de vigilance » mettra à contribution l’armée pour protéger notamment les écoles contre les dégradations et les pillages.
Les Mahorais sont-ils à présent rassurés ? Vont-ils surtout disposer en urgence d'eau, de vivres et de moyens pour s'abriter en toute sécurité ? François Bayrou, qui a promis monts et merveilles, est attendu au tournant.